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28 avril 2009 2 28 /04 /avril /2009 10:47

Hé ! hé ! Cela fait un bon moment que ça me démange, un p’tit article sur l’activité littéraire des jeunes… Eh oui, vous avez bien lu ! Les jeunes font selon moi œuvre littéraire bien plus qu’auparavant grâce à cet outil merveilleux qu’est l’Internet (mais pas seulement, bien sûr, nul n’est besoin d’être un blogueur pour écrire, et tout blogueur n’est pas « écrivain »).

Je lisais récemment l’article d’un quotidien national, suivi de nombreux commentaires, sur « la baisse de niveau en orthographe des jeunes », article basé sur les résultats à je ne sais quelle dictée du feu certificat d’études, fustigeant selon la coutume ce que sont nos jeunes devenus, et en profitant, à la veille d’une grève dans l’Éducation nationale, pour stigmatiser l’incurie de nos enseignants.
Le nombre de fautes d’orthographe émaillant les commentaires (généralement hargneux) était à lui seul éloquent, et témoigne de la difficulté du français moyen à utiliser sa langue maternelle, certificat d’études ou pas, difficulté accrue sur l’Internet par l’utilisation d’un clavier (fautes de frappe) et des messages trop vite relus et « postés ». Cela ne l’empêche pas de montrer du doigt les lacunes d’autrui et de se sentir supérieur… (Il faut dire que c’est devenu un sport national que de dénigrer la jeunesse et les enseignants.)

Sans vouloir entrer trop avant dans cette polémique (qui me fait tout de même ricaner gentiment), je tiens cependant à mettre en avant, pour la défense de nos enseignants, le fait que leur administration est réformée de façon régulière et doit s’adapter à un environnement qui évolue bien plus rapidement que par le passé (ce qui aura peut-être échappé à certains). Si à une certaine époque, un certificat d’études suffisait à trouver un emploi, ce n’est plus le cas aujourd’hui, et même des métiers réputés ne demander que peu de qualification nécessitent maintenant des diplômes, des compétences diverses et surtout une adaptation constante des individus. Cette évolution réclame des enseignements différents, et à différents âges de la vie. Les connaissances sont bien plus accessibles, ce qui importe est de savoir les utiliser. Et, très franchement, je doute que le niveau d’alphabétisation des jeunes ait été très supérieur au début du XXe siècle par rapport au début du XXIe…

La langue française est difficile, c’est un fait, et même les personnes de bon niveau font des fautes, quels que soient leur âge et leur profession, sinon la profession de correcteur n’existerait pas. Je ne nie pas que certains textes soient illisibles (autrement dit incompréhensibles) en raison du nombre de fautes, mais ce n’est pas l’apanage des jeunes générations… Ce que j’apprécie par contre chez ces dernières, c’est à la fois leur envie (besoin) d’écrire et de s’exprimer et leur courageux « passage à l’acte », mais aussi une certaine humilité.

En effet, si c’était au départ surtout une intuition, je suis impressionnée par la réalité, car le développement de pratiques d’écriture totalement libres (c’est-à-dire non imposées par le système scolaire) est une réalité. Même des jeunes en importante difficulté scolaire oseront faire un blog, c’est-à-dire un acte d’écriture travaillé (même succinctement) et exposé à la vue de tous, sans se faire trop d’illusions sur la valeur « littéraire » de leur production mais en cherchant au contraire à l’améliorer grâce aux commentaires de leurs lecteurs.
Je trouve tout simplement merveilleux ce pas dans la démocratisation de la libre expression : on n’a pas besoin d’être intronisé par une caste pour avoir le droit de prendre la parole. Dans une œuvre littéraire, le fond et la forme sont étroitement liés, et l’expression personnelle prévaut pour moi sur la forme, qui elle peut aisément se travailler et se corriger. La forme sans le fond c’est une coquille vide, ce n’est pas de la littérature. C’est l’âme humaine qui lui donne sa force, pas la bonne composition de l’encre sur le papier.

Et concernant la lecture, il n’aura échappé à personne (je l’espère) que le média Internet impose la lecture d’informations écrites (contrairement à la télévision et à la radio). C’est une lecture en effet différente de celle de la lecture d’un livre. Le lecteur y doit effectuer une synthèse d’informations parcellaires ou pléthoriques, émanant de sources diverses plus ou moins fiables, avoir un rôle actif de recherche, et être critique. Ne s’agit-il pas là de qualités appréciables chez tout bon lecteur ? Et cela n’empêche en rien la lecture parallèle de bons vieux livres dans lesquels on se plonge avec délice. La littérature fantasy est à cet égard un bon exemple : la pratique assidue d’Internet ne nuit pas à la lecture par des milliers de jeunes de cycles allant de trois à une quinzaine de volumes. Or, parmi les lecteurs plus âgés, combien peuvent se targuer d’avoir lu tous les Rougon-Macquart de Zola, La Comédie humaine de Balzac, l’œuvre entière de Victor Hugo ?

De nombreux jeunes ne lisent aucun livre (en dehors des lectures scolaires obligatoires, ce qui n’est déjà pas rien), me direz-vous ! Mais pensez-vous sérieusement qu’il n’y en a pas quantité d’adultes qui ne lisent jamais de livres eux non plus ? Les statistiques annuelles diffusées par le ministère de la Culture montrent en effet (et d’une manière régulière) que les plus jeunes lisent davantage de livres que les anciens.

Année 2005 (Source : Insee/DEPS – cité dans Statistiques de la culture, chiffres clés 2009)
Sur 100 personnes de 15 ans et plus, ont lu au moins un livre au cours des 12 derniers mois :

15-29 ans : 66
30-39 ans : 58
40-49 ans : 57
50-59 ans : 56
60-69 ans : 56
70-79 ans : 51
80 ans ou plus : 49
Total : 58
Hommes : 48
Femmes : 67

Dans son ouvrage, Lire des livres en France des années 1930 à 2000 (Éditions du Cercle de la librairie, 2000), Nicole Robine met également en évidence (outre un nombre de lecteurs bien plus important qu’autrefois) que « la jeunesse (enfance et adolescence) reste la période de la vie où on lit le plus », et que le niveau d’instruction et le sexe jouent un rôle bien plus discriminant que l’âge.

Pour ceux qui ne seraient toujours pas convaincus, je les invite à visiter mon skyblog pour y découvrir parmi mes «amis» nombre de blogs de lecture et d’écriture réalisés par des jeunes gens pour leur plaisir et sans aucune contrainte, hormis celles qu’ils se donnent (c’est d’ailleurs à eux que je dédie cet article).
Cessons donc de considérer notre jeunesse d’un œil acerbe, et regardons d’un œil étonné peut-être, mais bienveillant, ce qu’elle est capable de faire.

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commentaires

N
<br /> J'ai vraiment, vraiment envie de me mêler de ce sujet là, parce que premièrement, en tant que pseudo-écrivaine en herbe, je me sens concernée, et ensuite parce que j'ai envie de mettre mon nez<br /> partout ^^<br /> <br /> Donc, Isa, (précisons que sur Skyrock tu me connais sous le pseudo de reflexiondupoete ^^) Les jeunes écrivent, c'est la bonne blague qui fait bondir un peu tout le monde, mes amis qui me lancent<br /> le "je pourrais te liiiiiiiire?" et moi de répondre HDQ (Hors de Question) à tous sauf à ma meilleur amie, sur les blogs on a aussi l'idiote cométition des coms, les écrits bourrés de fautes<br /> d'orthographes, on a aussi quelques ilots, des forums d'écriture, des blogs d'éditeurs indépendants (sens toi visée très chère ^^) De même que dans la vie loin d'internet il y a les livres, et<br /> certains profs qu'on affectionne tout particulièrement, et à qui on demande un coup de pouce dans nos écrits de temps en temps (je pense notamment à ma prof' de grec  qui m'a aidé à corriger<br /> tout un dialogue en me disant ce qui ne lui plaisait pas.)<br /> <br /> Mais tout ça pour dire que OUI les jeunes écrivent, et que cela ne devrait pas être une surprise, tiens, par exemple, quand on lit un truc de malade (pour exemple j'ai le meurtre des nuages sur mon<br /> bureau) on se dit waouuuuuuuh moi aussi je veux savoir écrire comme ça, alors on tâtonne, on essayer d'inventer un monde qui ressemble, on abandonne.<br /> <br /> On fait ça à coup de "fics", de débuts d'histoires (si j'en faisais un recueil j'en aurais pour deux mille pages au moins) ou l'insipration est... euh... flagrante (je pense à un récit en troisième<br /> qui a tenu précisément douze pages et deux lignes qui présentait de troublantes ressemblances avec le pacte des marchombres de M'sieur Bottero), et lorsqu'on se fait toutes ces premières "armes"<br /> (on taille sa plume en fait) on peut peu à peu se libérer du modèle pour écrire "par soi même" en se nourissant certes de nos lectures, mais en y mettant une dose non négligeable (pour ne pas dire<br /> écrasante) de notre imagination, de nos sensations, de notre vécu, et j'en passe.<br /> <br /> <br /> A partir de là, on comprends aisément que les "jeunes écrivent" non? Je veux dire, on nous demande de nous taire et de nous bourrer le crâne dans le cadre d'études plus ou moins poussé, en resulte<br /> donc shématiquement trois types d'expression de l'individualité (source de ce qui suit: une étude menée par une de mes amies et moi même au sein de notre lycée le temps d'une heure de libre)<br /> <br /> - L'artiste, celui qui s'exprime par les mots écrits, par les images, bref par l'art.<br /> <br /> - Le fashion victime: expression par la mode (précisément expression de la pulsion grégaire, ou, pour citer mon prof de philo, du syndrome de l'asticot, bref, le mouton qui exprime son désir<br /> d'individualité en se fondant dans la masse, cherchez l'erreur!)<br /> <br /> - L'etudiant acharné, cas le moins répandu, et le plus inquiètant dans mon lycée, il y a des gens, l'une de mes meilleurs amies par exemple qui ne s'interesse à RIEN! pas de musique, RIEN ! comme<br /> expression de soi, nothing, et honnêtement cela a deux conséquences, premièrement, l'abscence de niveau de conversation décollant du ras des pâquerettes, et deuxièmement, un sérieux souci du côté<br /> de l'équilibre, puisque ne pas exprimer ce que l'on est reviens à (selon bibi, libre à tous de me contredire) nier ce que l'on est justement, se contenter d'une existante monotone, et non dévoiler<br /> son individualité.<br /> <br /> On comprend alors aisément que beaucoup de jeunes s'engouffrent, un temps ou toute une vie, dans le modèle de l'artiste.<br /> <br /> Et puis et puis, comment parler d'écrire sans parler du plaisir de raconter des histoires, sans parler de l'amour pour les jolis mots, pour les belles tournures, pour les idées abracadabrantes, les<br /> autres mondes, les aventures? Hein?<br /> <br /> bref bref, xD voila tout.<br /> <br /> <br />
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T
C'est vrai que nous autres enseignants (bon, j'anticipe de quelques années en m'incluant dans le groupe) avons la vie dure, avec une réforme par gouvernement, les 3/4 du temps mauvaise, une critique permanente et souvent injustifiée...Et c'est vrai que les moins jeunes aussi font des fautes. La preuve : "le taux d'alphabétisme des jeunes", as-tu écrit... On dit pas plutot alphabétisation ? hé hé hé
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I
<br /> Ah oui ? J'ai écrit ça, moi ? Tu as tout à fait raison, chère Tlina, je m'en vais le corriger de ce pas. Je vois que tu manies déjà le stylo rouge avec dextérité  !  <br /> <br /> <br />
D
Isa... Merci ! Je crois bien que tu es la première adulte que je rencontre ( si on peut dire "rencontrer" bien sûr ) qui ne se laisse pas berner par cette... Fable sur les jeunes ! Mêmes mes profs se plaignent que nous ne lisions pas assez ( d'ailleurs, je ne leurs répondrais et ne leur répondrai rien, mais... Je n'en pense pas moins ! ) ! Comme Baldwulf, je pense que JKR a aidé à ce... "mouvement de lecture", mais elle n'a fait qu'affirmer le phénomène. J'ai récemment lu un article ( j'avais chipé le télérama de ma mère ) dans lequel ils expliquaient qu'il y a quelques années ( je ne me rappelle plus exactement ) on passait directement de la littérature enfantine à la littérature dite normale, sans intermédiaire au rayon jeunesse. Un rayon intermédiaire a été créé ( je ne me rappelle plus la date ) d'abord uniquement fourni avec des livres de poches ( les éditeurs pensaient que les pavés effraieraient les jeunes ) puis ( à partir d'à la croisée des mondes, de Philip Pullman ) en grands formats.En tous cas, il serait totalement faux d'affirmer que nous ne lisons pas ( même si comme tout, ça dépend de la personne ), et je te remercie de tenter de démentir ce mythe populaire =)
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I
<br /> Je viens de lire l'article en question ! (Télérama du 2 au 8 mai)   J'espère que de nombreux libraires le liront !  <br /> Mais cet article me fruste un peu, car, il met uniquement l'accent sur les jeunes en tant que consommateurs.  Même si l'activité des blogueurs est relevée, c'est en marge, comme contribution<br /> au succès du livre à succès dont il est question, il ne soulève pas (ou à peine en évoquant la jeune fille chargée du blog officiel Twilight et les fanfictions) la question de la créativité des<br /> jeunes blogueurs (il est vrai que ce n'était pas le sujet de l'article). En ce qui concerne la question du format, il est vrai que, depuis Harry Potter, les "gros livres" ne font plus peur. Mais 20<br /> euros le volume quand c'est une série, je trouve ça un peu cher, et en tout cas, peu incitatif à la découverte d'auteurs jeunes et inconnus.<br /> Il y a des tas de blogues de lecture, avec des approches différentes, souvent un gros travail pour les réaliser, qui ne traitent pas spécifiquement de Twilight et l'abordent parmi d'autres lectures<br /> (c'est en effet sur les blogues que j'ai découvert ce livre).  Et il serait temps de mettre en valeur l'importante activité littéraire qui s'épanouit dans les nombreux blogues d'écriture,<br /> forums, et autres ateliers d'écriture, comme le note Baldwulf. (En soutenant les éditeurs qui leur font confiance par exemple ;-).<br /> <br /> <br />
B
Un beau plaidoyer en faveur de ces adolescents qui ont décidé de vivre leur passion pour l'écriture et la lecture.Au niveau de la fantasy, des sagas comme celle de Harry Potter, ou encore Ewilan, ont fait découvrir les plaisirs de la lecture à toute une génération de jeunes (et moins jeunes). Je me rappelle de ma première année face à des adolescents, et de cet élève en très grande difficulté qui était avec son pavé de l'Ordre du Phénix dans les couloirs du lycée en attendant le début des cours. Comme quoi on peut éprouver des difficultés scolaires et ouvrir un livre, sans être rebuté par son épaisseur ! Rowling a, à mon sens, beaucoup fait à ce niveau, même chez certains adultes.De la même façon, dans les ateliers et forums d'écriture, j'ai l'impression que les 13-18 ans sont de plus en plus présents. C'est quelque chose de vraiment formidable. Ils commencent à peine à écrire et pourtant ils ont déjà la démarche de présenter leur travail, d'accepter les critiques, voire de les réclamer.Alors certes, l'orthographe n'est peut-être pas toujours bien maîtrisée, mais la créativité est là et c'est elle qu'il faut avant tout encourager, car elle fait si souvent défaut aux adultes...
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